Chloé Sainte-Marie et Jean Morisset lancent aujourd’hui le livre-disque Maudit silence, qui paraît conjointement chez Audiogram et aux Éditions de l’Hexagone, et qui prendra également vie sur scène lors d’une vaste tournée de spectacles au Québec. Grande amoureuse de poésie et des langues, Chloé Sainte-Marie porte depuis longtemps la parole innue que lui a transmise son amie Joséphine Bacon et qu’elle lie intimement à son travail de création (Mishapan Nitassinanet l’album Nitshisseniten e Tshissenitamin – Je sais que tu sais). Né de sa rencontre coup de cœur avec Jean Morisset, Maudit Silence la projette encore plus loin – jusqu’en Patagonie ! – dans une œuvre accomplie et de longue haleine qui combine ses passions et préoccupations aux recherches de l’écrivain et géographe. Auteur de plusieurs recueils et essais, notamment Sur la piste du Canada errant (Éditions du Boréal, 2018), Morisset a sillonné les Amériques d’un pôle à l’autre en quête de l’identité de ce territoire de métissage, celle nouée ou trouée de silence, à laquelle il consacre sa plume.
UN PROJET D’ENVERGURE POUR RENVERSER LE MUTISME
Maudit silence est composé d’un livre de 127 pages et de deux disques comptant 27 pistes, qui rassemblent des poèmes issus des Trois Amériques, chantés, récités ou déposés pour leur inspiration en 14 langues latines, créoles et autochtones : innu, quechua, espagnol, français, créole canadien, créole haïtien, guarani, mapuche-mapuzungun et plus encore. Inédits ou jamais gravés sur disque, des textes de Mathias Carvalho, Nancy Huston, Jack Kérouac, Jean Morisset, James Noël, Louis Riel et Joséphine Bacon (dont le poème liminaire donne le titre au projet) font résonner une parole déployée – nourrie par la puissance des récits et des images –, le verso de l’histoire apprise et racontée.
Et qui pouvait mettre en musique ce florilège de mots et de langues sinon Yves Desrosiers ? Compositeur de talent ayant travaillé avec tant de créateurs, explorateur dans l’âme et jusqu’au bout des doigts, Desrosiers pénètre et imprègne chaque poème de son imaginaire musical, de ses mélodies sensibles et riches. Embrassant tout le continent de sa voix, Chloé Sainte-Marie interprète la plupart des chants, accompagnée de chœurs métissés. On y entend également Joséphine Bacon,Cindy Belotte, Fiorella Boucher, Gladys, Nhenety Kariri-Xocó, Lola Kiepja, Christian Laveau, Ariel Loussant, James Noël, Mateo Pablo, Necul Painemal Morales, Rhoda Ungalaqet Wara réciter certains textes et enchaînements. À la réalisation, enfin, François Richard guide une fabuleuse équipe d’artistes dans cette traversée, ce paysage sonore plein de relief, bercé et rythmé par la guitare, le piano, l’élan des cordes, les percussions dansantes et quelques touches d’orgue ou de clarinette.
Élaboré par Jean Morisset, véritable collectionneur d’artefacts, le livre regroupe les poèmes mis en musique et leur traduction, mais aussi d’autres textes à caractère historique ou courtisant le vécu, écrits par Morisset lui-même, Mathias Carvalho et Anne Chapman ; des textes qui se font hommage et « poignée de main transpolaire » à tous ceux ayant « résisté aux attaques des coupeurs de langues ». Des notes manuscrites, des illustrations et aquarelles, des photographies, ainsi que des documents cartographiques et images d’archives complètent ce magnifique ouvrage, tel un devoir d’art et de mémoire. Une œuvre à lire et à parcourir dans toute sa géographie, à écouter dans toutes ses intonations, comme ce vaste territoire qui nous réunit.
Cet album-livre a nécessité cinq siècles de préparation et six années de plus
Un petit saut en Patagonie, un nounatak en terre d’Ellesmere et un arrêt en Caraïbe là où tout a commencé
Conçu sur un vaisseau appelé Isle-Verte ayant jeté l’ancre du post-glaciaire sur les rives de la Grande rivière de Canada
Cet album-livre résulte d’un projet commun à tous les nés des Amériques qui interrogent l’aller-retour des antipodes à même le métissage des latitudes et le chant de l’oralité première dont nous sommes les heureux tributaires |